Le Rassemblement-Action-Jeunesse (RAJ) tire la sonnette d’alarme quant à la xénophobie et le racisme que subissent les migrants subsahariens en Algérie. Ce séminaire sur la migration organisé vendredi 19 décembre par RAJ, à son siège à Alger, entendait le rétablissement du respect, la dignité et la solidarité à l’égard des migrants subsahariens, « arrêtés, refoulés et abandonnés dans des circonstances douloureuses ».
« Trop, c’est trop ! Cela devient de l’ordre de l’insoutenable », a d’emblée lancé Fatma Oussedik, sociologue et enseignante universitaire lors de son intervention, intitulée « De nouveau, damnées de la terre ». Dans un discours tantôt agressif tantôt désolé, la conférencière s’est indignée du racisme subit par les migrants « africains ».
Mme Oussedik a aussitôt souligné, dans une approche historique, sociale et politique, le rôle que de nombreux pays africains, notamment le Mali, la Guinée et l’Afrique du Sud ont joué dans la libération de l’Algérie.
« L’indépendance de l’Algérie était celle de toute l’Afrique ! L’Algérie s’est libérée du colon à l’aide des pays africains, qui la soutenaient politiquement, militairement et socialement », rappelle-t-elle.
Un rappel « des dettes » que la société algérienne doit verser à ces « pays frères », à Frantz Fanon et Patrice Lumumba, en accueillant solidairement et chaleureusement ces « compatriotes », au détriment de la xénophobie et du racisme.
« Allons-nous revêtir le visage des frères-traîtres et renier les dettes que nous devons à ces peuples africains ? « L’Algérie va-t-elle enfiler l’habit du colon et reproduire la torture dont nous avons été victimes durant plus de 130 ans ? », s’indigne Fatima Oussedik.
La sociologue n’a pas manqué de souligner la passivité des autorités algériennes, notamment la non prise en charge juridique et administrative des migrants.
« Si un réfugié est illégal dans les rues d’Alger, nous sommes tous illégaux dans les rues d’Alger. Chaque fois qu’un africain est humilié, nous sommes humiliés, car nous sommes nous-mêmes des Africains! », crie-t-elle.
La presse doit rectifier son tir
Le journaliste Yassine Temlali a, quant à lui mis en exergue, dans son intervention intitulée « Quelques réflexions sur l’image des immigrants subsahariens dans la presse algérienne », le rôle des journaux qui « versent dans la xénophobie et entretiennent la flamme raciste ».
L’auteur d’une étude sur la même thématique évoque une presse « de stigmatisation et de victimisation » des ressortissants nigériens,qui ne sont que « des faits divers liés au vol, au traffic » et à toute autre forme de stigmatisation.
Yassine Temlali reprend par la suite l’approche socio-historique de Fatima Oussedik, indiquant que « nous sommes nous-mêmes des migrants ».
« Nous oublions qui nous sommes ! Notre histoire a toujours été marquée par un mouvement migratoire de l’Afrique Subsaharienne et du Moyen-Orient « , rappelle-t-il.
« Ne nous cachons plus »
Dieffaga Abdelkader, consultant et référant migrant pour l’association Caritas Algérie, a témoigné de son parcours en tant que migrant depuis une décennie sur le territoire algérien.
Abordant par ailleurs la présence de milliers de nigériens dans les ruelles d’Alger, d’Oran et d’autres wilayas, il a déclaré que ce mouvement migratoire a permis aux autres ressortissants des autres pays de se manifester, « et dire que nous sommes là, nous voulons la paix ».
« Cette visibilité a cassé la stigmatisation de la presse et de la société, et brisé les tabous sur cette question très sensible », a-t-il déclaré lors de son intervention, titrée « Témoignage sur la situation des migrants et réfugiés en Algérie ».
Une « rassemblement » qui leur a permis de réclamer à voix haute ce dont ils ont besoin et ce qu’ils attendent de la part des autorités.
Le Rassemblement-Action-Jeunesse veut ainsi « continuer son combat pour le respect des droits de l’Homme des migrants et des réfugiés, la liberté de circulation contre les politiques anti-migratoires et le racisme ».
Source : huffpostmaghreb.com