Nous, participant(e)s, acteurs, actrices et militant(e)s de l’information alternative, qui utilisent la communication comme outil de transformation sociale et défendent le droit à la communication et la liberté d’expression, réunis à Tunis, du 24 au 29 mars 2013, lors du 3ème Forum Mondial des Médias Libres (FMML); considèrent cette rencontre hautement symbolique car elle s’est tenue dans le pays où les médias libres ont joué un rôle important pour le changement social.
Pendant ce forum, qui a accordé une attention particulière à la radio communautaire- associative, outil de démocratisation incontournable non reconnue juridiquement dans les pays de la région différents sujets ont été abordés : le processus du FMML, le droit à la communication, l’information en tant que bien commun, l’appropriation technologique, la régulationet principalement les conditions de promotion pour que ce secteur d’intérêt public soit un élément essentiel du développement et de la démocratie.
Considérant que :
L’information est un bien commun et le droit à la communication est un droit fondamental, inaliénable;
Tout champ médiatique, partie-prenante de la démocratisation de l’Etat et de la société, doit être guidé et encadré par le référentiel de l’article 19 de la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme1, ainsi que par l’éthique et la déontologie des médias telles que consignées dans les chartes mondialement adoptées et promues parmi les professionnels des médias au plan régional et international ;
Constatant :
La mainmise des pouvoirs politiques, économiques et industriels sur l’information ;
L’instrumentalisation et la marchandisation de l’information par les Etats et les grands
groupes médiatiques ;
L’augmentation de la concentration du pouvoir et des groupes médiatiques ;
L’inadéquation entre des cadres juridiques anciens et des système médiatiques qui
évoluent en même temps que les avancées technologiques ;
Une absence quasi généralisée de lois en faveur de l’accès des citoyens à l’information
publique ;
Un manque de soutien à la production et la diffusion par les citoyens d’une
information plurielle, diversifiée et critique ;
Une liberté d’expression et une liberté de la presse mises à mal par des lois
liberticides ;
Une répression violente contre les citoyens et les acteurs de l’information ;
L’importance de la fracture numérique qui entrave l’exercice du droit à la
communication ;
Les menaces quant à la protection des données personnelles sur Internet ;
Une émergence de médias libres et citoyens qui contribuent à des changements
sociaux et politiques, comme l’a démontré le printemps démocratique
Tout individu a droit à la liberté d’opinion et d’expression, ce qui implique le droit de ne pas être inquiété pour ses opinions et celui de chercher, de recevoir et de répandre, sans considérations de frontières, les informations et les idées par quelque moyen d’expression que ce soit.

Observant plus particulièrement au Maghreb-Machrek et en Afrique :
La nécessité pour les sociétés de la région Maghreb-Machrek et de toute l’Afrique, de disposer d’un champ médiatique diversifié et démocratique, nourri par une participation effective et par une appropriation protégée et légitimée de l’expression médiatique par les citoyens;
La lutte pour la reconnaissance juridique des radios associatives-communautaires dans la région est désormais un levier décisif pour l’avenir des sociétés et de leur mode de gouvernance à tous les niveaux et dans tous les secteurs de la vie collective.
Nous appelons à :
Un accès libre et démocratique à l’information conformément aux principes universels des droits humains;
La mise en œuvre du droit à la communication conformément aux conventions et standards internationaux;
La défense des cadres réglementaires qui garantissent l’accès à l’information et la liberté d’expression pour tous et toutes;
La mise en place d’autorités de régulation de la radiodiffusion qui soient véritablement indépendants de l’autorité politique et des pouvoirs d’argent ;
L’accès au spectre hertzien pour les médias associatifs et communautaires et, plus particulièrement concernant la région Maghreb-Machrek, la reconnaissance dans les législations de la radio associative-communautaire en tant que 3ème secteur de la radiodiffusion, à côté des secteurs public et privé, et l’attribution de fréquences à ces radios d’une manière équitable;
La mise en place de politiques publiques pour soutenir la diversité et la pluralité des médias;
L’accès et la gratuité de la connectivité Internet pour tous et toutes;
La défense d’un Internet libre et gouverné démocratiquement;
La décentralisation et appropriation des infrastructures et logiciels libres (Mesh, P2P);
La promotion de la cryptographie pour défendre l’anonymat dans les communications;
La promotion de la culture libre, et de la notion de biens communs et la défense de la
philosophie des logiciels libres, pour garantir la souveraineté technologique.
Nous nous engageons à:
Approfondir le dialogue entre les médias libres et les mouvements sociaux autour des droits à la communication et de la connaissance par rapport à la violation de ces droits;
Soutenir les initiatives militant et oeuvrant pour l’effectivité du droit à la
communication;
Constituer un réseau qui coordonnera les campagnes de plaidoyer pour garantir et
renforcer le droit à la communication;
Réfléchir à un modèle qui garantisse la viabilité, la pérennité et l’indépendance des
médias libres;
Créer un groupe de réseau de partage entre pays du Nord et pays du Sud pour promouvoir l’utilisation de hardware (matériel) et software (logiciels) libres pour une démocratisation et une diffusion massive des savoirs technologiques;
Construire et développer des alternatives libres pour les réseaux sociaux;
Réfléchir à l’impact environnemental de l’utilisation des nouvelles technologies;
Élaborer la Charte Mondiale des Médias Libres qui fédère autour des principes et
valeurs et d’un code de déontologie communs les acteurs des médias libres;
Continuer la construction du processus du FMML.