L’importance de la participation tunisienne à la mobilisation climatique
Le changement climatique est en cours en Tunisie. Le niveau de la mer monte et menace les régions côtières. Les terres se font plus arides et plus salées. L’eau est amenée à manquer. Ces phénomènes se font plus durement ressentir dans les régions du Sud et de l’intérieur, déjà marginalisées. Ils touchent en particulier les pauvres, les femmes, les enfants, les personnes âgées. En somme, ils amplifient les inégalités existantes à l’intérieur du pays. Et la situation va sans doute s’aggraver.
Le Sud de la Méditerranée fait partie des régions du monde les plus menacées par le changement climatique. Pourtant, les populations de ces pays y ont très peu contribué. Ce constat peut être généralisé à l’ensemble de la planète : si ce sont les pays du Nord qui, depuis la révolution industrielle, ont envoyé le plus de gaz à effet de serre dans l’atmosphère, ce sont les pays du Sud qui sont les plus vulnérables face aux changements climatiques qui en découlent. On peut donc considérer que les pays du Nord ont contracté une dette climatique envers les pays du Sud. Et pourtant, à l’heure actuelle, les pays du Nord n’ont pas prévu de faire de grands efforts pour permettre aux populations vulnérables de ces derniers de s’adapter. En outre, ces questions sont accaparées par les discours d’experts et ne font pas encore l’objet d’un véritable débat démocratique.
C’est pourquoi la venue de la société civile tunisienne à Paris lors de la COP21 est importante. La participation tunisienne à la mobilisation climatique doit permettre à la société civile tunisienne, et plus largement au peuple tunisien, de se saisir de ces questions et de comprendre le fonctionnement – et les dysfonctionnements – des COP. Elle donnera voix aux revendications de justice climatique, pour réclamer les droits des populations actuelles et futures.
Montrer les liens entre changement climatique et droits humains
Le Forum Tunisien pour les Droits Economiques et Sociaux se préoccupe des questions climatiques dans la mesure où celles-ci affectent les droits humains : il sera représenté au Climat Forum de Montreuil les 5 et 6 décembre, afin de débattre de l’accès à l’eau et du droit au développement juste et équitable dans un contexte de crise climatique.
Avenue Bourguiba, Tunis, le 13/11
L’association Nomad08, originaire du bassin minier et dont la mission principale est la promotion du logiciel libre, investira d’autres espaces : la Zone d’Action Climat le 8 décembre, avec l’activité « Bassin Toxique de Gafsa » pour inciter l’industrie du phosphate, qui alimente aussi un modèle d’agriculture climaticide, à assumer ses responsabilités environnementales et sociales, et le Village Mondial des Alternatives, les 5 et 6 décembre, avec un atelier sur le recyclage à la fois artistique et pratique, en collaboration avec l’association nantaise APO33.
Le bassin minier, lieu d’extraction du phosphate, qui alimente un modèle d’agriculture climaticide
Les jeunes tunisiens engagés pour la justice climatique
Le changement climatique menace les conditions de vie des générations futures. Dans ce contexte, la participation des jeunes est primoridale. Les jeunes tunisiens du groupe « Our Life 21 » viennent des quatre coins de la Tunisie. Grâce à l’association Prioriterre, ils participeront à la COY, la Conference of Youth, où ils témoigneront de leurs aspirations pour 2050 en tenant compte des prévisions climatiques. Le 29 novembre, ils iront marcher avec des dizaines de milliers de citoyens du monde entier, pour montrer aux gouvernements qu’ils sont sous les yeux de la société civile, à la veille des négociations finales. Ils participeront aussi à des tables rondes, des actions, des rencontres.
Un autre groupe de jeunes tunisiens prépare sa venue à Paris depuis quelques mois. Ils ont entre 20 et 26 ans, sont étudiants ou activistes et ils ont réfléchi aux liens entre climat, démocratie, science et engagement dans le cadre du Tunis Climat Tour. Ils seront actifs au Forum Climat à Montreuil le week-end des 5 et 6 novembre aux côtés des Petits Débrouillards, rejoindront les actions anti-fracking du 10 décembre, les différentes manifestations de Paris et de ses banlieues, et l’action de masse du 12 décembre à la clôture de la COP.
Les participants au Tunis Climat Tour (RAJ-Tunisie, Campus El Manar). 12 d’entre eux vont se rendre à Paris pour la COP21
Lier les deux rives de la Méditerranée dans la mobilisation !
Alors que l’Europe s’enferme à l’intérieur de ses murs, et au moment où la France ferme ses frontières avec les pays voisins pour la COP21, la société civile persiste à vouloir rapprocher les peuples du monde, notamment de part et d’autre de la Méditerranée. Les associations tunisiennes sont désireuses d’établir des partenariats et des échanges avec les mouvements du monde entier, mais aussi des groupes locaux, comme par exemple en Ile de France, pour échanger sur leurs expériences, élargir leurs horizons, et construire des réseaux qui font fi des frontières et des déséquilibres Nords/Suds. C’est le cas, par exemple, du Forum Méditerranéen contre le Gaz de Schiste et le Fracking, qui sera au Village Mondial des Alternatives et qui, au-delà d’une lutte commune aux deux rives contre cette source d’énergie dangereuse à la fois localement et globalement pour le climat, vise à « apporter des solutions concrètes à complémentarité entre autonomie locale et solidarité à l’échelle des pays et des régions ».
Diane Robert