Point hebdomadaire n°22
Cela fait six mois que l’ASDHOM a lancé la campagne de parrainage des prisonniers politiques au Maroc. Au lancement de cette opération de solidarité, parrainée par Gilles Perrault, nous avons comptabilisé 172 victimes de violations de droits que nous avons proposées au parrainage.
Si 31 parmi ces détenu-e-s ont, depuis, été libéré-e-s à la fin de leurs peines, 78 autres ont été arrêté-e-s et condamné-e-s ou dont le procès est encours. Plusieurs militants de l’Union Nationale des Etudiants du Maroc font partie de ces derniers.
Ce point hebdomadaire leur est largement consacré et notamment à ceux, parmi eux, qui mènent une grève de la faim.
Les informations que nous recevons sur leur état de santé sont inquiétantes et nous préoccupent au premier degré. L’ASDHOM déplore que les autorités marocaines n’aient pas répondu favorablement aux différents appels que des organisations des droits de l’Homme et des parlementaires européens leur ont adressés pour satisfaire les revendications des grévistes de la faim.
Voici ci-dessous un aperçu rapide sur la situation :
Groupe UNEM-Taza : Tarek Hammani et Abdessamad Haidour sont à leur 63ème jour de la grève de la faim. Un rapport publié récemment fait état de conditions de détention inhumaines à la prison locale de Taza où ils sont entassés à 17 dans une cellule de 16 m2 avec des prisonniers de droit commun. Affaiblis par la grève de la faim (perte significative de poids), ils ont été admis à l’hôpital Bnou Bajja où ils sont enchainés à leurs lits. La section de l’AMDH a pu leur rendre visite pour s’enquérir de leur santé après que leurs familles aient été informées de la dégradation soudaine de leur santé. Il devient urgent que les autorités pénitentiaires accèdent à leurs revendications. Un drame peut survenir à tout moment et les autorités marocaines en porteront la responsabilité.
Groupe UNEM-Fès : Tarek Jaïbi, Younes Erroufi, Hicham Boughlad et Mohamed Saleh, prisonniers politiques de l’UNEM, incarcérés à la prison locale Ain Kadous, sont à leur 40ème jour de la grève de la faim. Le 28 avril, Ils signent un communiqué avec 19 autres nouveaux militants de l’UNEM, dont deux femmes, pour dénoncer leurs conditions de détention et réclamer leur libération. Ces derniers ont été arrêtés suite aux interventions violentes des forces de l’ordre après que les étudiants du campus Dhar El-Mahraz aient décidé de boycotter les examens universitaires du 15 avril et entamer une série de manifestations pacifiques. Le 1er mai, les forces de l’ordre ont arrêté deux autres militants qui ont participé aux marches des travailleurs ce jour-là. Voici donc la liste des noms après ces arrestations : Al-Bouche Aïcha, Sabah Asmae, Chafik Salah Eddine, Moussa Sammouni, Mimoun Benziza, Abdelhaq Bouti, Youssef Bouarfa, Mohamed Boughanem, Abdelkrim Rabhi, Mourad Boubker, Jaber Rouijel, Abdelouahed Mourabit, Mohamed Hammouch, Hamid El-Moumen, Anas Bachiri, Yassine Tirid, Achraf Sekkouri, Rachid Aghzar, Omar Taybi, Oussama Zantar et Abdennabi Chaoul.
Groupe UNEM-Meknès : Hassan Koukou, Soufiane Sghéri, Mounir Ait Khafou, Mohamed Eloualki et Hassan Ahmouch, militants de l’UNEM, arrêtés depuis décembre 2012, sont à leur 55ème jour de la grève de la faim. Leur état de santé se détériore de jour en jour. Voyant que les autorités pénitentiaires refusent d’accéder à leurs revendications, ils ont décidé de mener en plus de la grève de la faim, une grève de la soif pour 72 heures à partir du lundi 6 mai.
Sur ce sujet de la grève de la faim, l’ASDHOM salue l’initiative prise par l’association Maroc Solidarités Citoyennes, basée à Grenoble, en invitant les personnes éprises de justice à signer la pétition qu’elle a lancée en faveur des prisonniers politiques, grévistes de la faim. Vous trouverez cette pétition sur le site de l’ASDHOM, rubrique Témoignages et lettres.
Groupe UNEM-Marrakech : Après plusieurs reports, les dix militants de l’UNEM (Voir points hebdomadaires précédents), arrêtés à Marrakech en janvier dernier, viennent en ce début mai d’être fixés sur leur sort. Aziz El-Bour, Mohamed Mouaden, Hicham Meskini et Abdelhaq Talhaoui ont écopé de 3 ans de prison ferme. Hamid Zaddou, Mohamed Ahrik et Boujamaâ Jamou ont écopé de 2 ans et demi de prison ferme. Baghdadi, Ouakkassi et Najimi ont, quant à eux, écopé de 2 ans de prison ferme.
Groupe Ouarzazate-Syndicalistes : Le secrétaire local de la CDT-Ouarzazate (Confédération Démocratique du Travail), Hamid Majdi, également membre du Parti Socialiste Unifié et de l’AMDH, a été présenté devant le juge du tribunal de première instance de Marrakech le 24 avril 2013 après avoir été arrêté en décembre 2012. L’ASDHOM avait informé de son arrestation. Hamid Majdi est connu pour son implication dans la défense des mineurs de la région d’Ouarzazate dont certains se sont retrouvés en prison pour leur mouvement de protestation contre les responsables de SMI, la société qui exploite les mines de la région. Son procès est fabriqué de toutes pièces. On l’a accusé d’être en possession de la drogue qu’il cachait dans sa voiture ! Son procès a été reporté au 8 mai 2013. Un comité régional de défense des prisonniers politiques et syndicaux s’est constitué de toutes les organisations démocratiques de la ville et a publié un communiqué pour lui apporter son soutien et condamner les méthodes utilisées par les services de l’Etat marocain en totale contradiction avec le discours relatif au respect des droits de l’Homme.
Groupe 20-Février-Al-Hoceima : Le prisonnier politique Abdallah Afallah, condamné à 3 ans de prison ferme, n’a pas été autorisé par les autorités pénitentiaires de la prison d’Al-Hoceima à assister aux funérailles de son père, décédé le mercredi 1er mai 2013. Cette possibilité a d’ailleurs été accordée à d’autres prisonniers qui ont en fait la demande. Ce « deux poids, deux mesures » est condamnable. Il montre l’attitude de vengeance que pratique l’administration pénitentiaire envers les prisonniers politiques.
Groupe Belliraj-Salé : Ali Aarrass, Belgo-Marocain condamné à 15 ans de prison ferme après avoir été extradé par l’Espagne le 14 décembre 2010, clame toujours son innocence. Dans une lettre que sa sœur Farida a traduite pour son comité de soutien en Belgique, et où il dénonce ces 4 ans de détention arbitraire, il dit « côtoyer des horreurs et des injustices qu’aucun homme ne pourrait jamais imaginer ! Le nombre de personnes torturées dans des centres comme celui de Temara, avant d’être amenés en prison, est impressionnant ! Nombre de prisonniers n’ont ni avocats, ni famille pour s’inquiéter de leur sort ! Certains d’entre eux ont été torturés des mois durant. »
Rappelons que le célèbre juge espagnol, Garzon Baltasar, l’avait innocenté de tout fait de terrorisme qui lui avait été reproché.
Groupe Kalaât Sraghna (Nouveau) : Trois militants, membres du Parti de l’Avant-garde Démocratique et Socialiste (PADS), de l’AMDH, du mouvement 20-Février et de l’ANDCM, seront présentés devant un tribunal d’appel de Kalaât Sraghna, le 9 mai 2013, après avoir été jugés en première instance à une amende de 2000 Dirhams chacun. On leur reproche leur campagne en faveur du boycott des élections législatives du 25 novembre 2011. Il s’agit de Safi Eddine El-Boudali, Abdennaji Koumri et Azzedine Louzi. L’ASDHOM considère que ce procès est une atteinte flagrante à la liberté d’expression et d’opinion. Elle demande purement et simplement l’abandon des charges aberrantes retenues contre eux.
Après ce tour de prisons et tribunaux marocains, vous constaterez que nos listes sont passées de 172 à 219 candidat-e-s au parrainage. Ce nombre risque malheureusement d’augmenter quand on voit les rapports d’ONG et les informations accompagnées de vidéos qui nous proviennent d’Assa, de Boujdour et surtout de Laâyoune au Sahara. Depuis la décision du Conseil de Sécurité qui a prorogé la mission de la MINURSO sans l’étendre à l’observation des droits de l’Homme dans la région, les derniers événements concernant le conflit du Sahara Occidental sont accompagnés d’interventions violentes de la part des forces de l’ordre marocaines faisant plusieurs blessé-e-s. Des responsables sahraouis d’associations de défense de droits de l’Homme ont été intimidés et inquiétés jusque dans leurs domiciles.
Pour le bureau exécutif
Ayad Ahram
Président de l’ASDHOM
Paris, le 5 mai 2013